L’église du Cœur immaculé de Marie réouverte !

Le week-end du 1er et 2 juin a vu les portes de l’église du Cœur immaculé de Marie s’ouvrir à nouveau ! Après plusieurs mois de travaux, Mgr Gérard Le Stang, évêque d’Amiens, est venu célébrer la messe d’ouverture et inaugurer. En cette Fête-Dieu 2024, notre évêque a partagé avec les paroissiens la joie de voir l’église réouverte.

Procession, "thé-moignages", escape-game, repas partagé, conférence.. un week-end festif !

L'homélie de Mgr Gérard Le Stang à cette occasion !

Chers frères et sœurs,

Plus de 70 ans après sa construction dans les années, une croix a été posée – et bénie -, sur la façade de cette église du cœur immaculée de Marie. Le grand bâtiment au toit vert, qui se voit de loin dans le quartier, est désormais repéré clairement comme un édifice chrétien, qui rassemble la communauté catholique présente au cœur d’une cité aux multiples religions et croyances. Cette croix posée sur la façade et l’ensemble de la rénovation réussie de ce vaste bâtiment est un signe pour le temps que nous vivons. Dans les années 30, l’arrivée de nombreux habitants appelait la construction d’un lieu de culte. Dans les années 50, les prêtres et laïcs, nombreux et jeunes, souhaitaient une église plus proche d’eux et plus vaste. Nous sommes en 2024 : la communauté chrétienne rassemble des personnes, des familles – avec de jeunes enfants – de diverses origines : Viet Nam, Égypte, Afrique subsaharienne…

et un certain nombre de picards aussi ! Des jeunes et des adultes frappent à la porte pour demander les sacrements d’initiation, ou pour retrouver le chemin de la foi. Les adolescents ont besoin d’être aidés à être fiers de leur foi et capables d’en rendre compte, écartelés entre les pressions de leurs amis athées ou musulmans. Les jeunes adultes ont besoin d’une boussole et d’une espérance – pour eux et leurs enfants – afin de garder le cap dans un monde pris dans les rapides de l’histoire, les menaces de guerre, les transformations des chemins du savoir et la crise de l’environnement et les aveuglements politiques : tant de paramètres qui abîment les psychismes et désorientent les gens. L’église au toit vert, l’église du Cœur Immaculée de Marie (par pitié, ne dites plus CIM, arrêtons avec les signes dont on ne sait pas le sens !), cette église du Cœur de Marie parle à nouveau à notre cœur : elle donne une âme à ce quartier, elle nous donne du cœur à l’ouvrage pour être d’humbles témoins de cette foi que nous avons la grâce et le bonheur d’avoir reçu.

Cette église est un lieu pour nos assemblées. Le mots Église, ekklesia, vient d’ailleurs du grec qui veut dire assemblée, convoquée par Dieu qui se donne, avant d’être envoyée pour que nos vies soient contagieuses de son amour. Il n’y a pas d’église sans assemblée. C’est un des grands défis pour les chrétiens de notre temps : retrouver le goût de se rassembler, prendre le rythme de ce rassemblement, normalement hebdomadaire. Dans ma première lettre pastorale, j’avais nommé ce défi : « Réussir le dimanche ». Se rassembler en un lieu, non seulement pour la messe, mais par amitié entre nous, pour se soutenir

les uns les autres, pour des temps de catéchèses avec les catéchumènes, les enfants, les lycées et autres groupes, pour des formations ou des activités communes. Réussir le dimanche, c’est en faire vraiment le Jour du Seigneur, donner la priorité à Dieu, ce jour-là, et nous reposer en Lui.

Dans cette église, il y aura à nouveau en ce lieu, chaque dimanche, la célébration de l’eucharistie, de la messe. En recevant le Corps du Christ, se réalise sous nos yeux un miracle : nous venons d’horizons, de cultures, de familles, d’idées si différents, et parfois opposés. Mais en communiant au Corps du Christ, nous devenons l’unique Corps du Christ, son Église. Miracle de l’Église : « Nous sommes le Corps du Christ, chacun de nous est membre de ce Corps, chacun reçoit la grâce de l’Esprit pour le bien du Corps entier ». Un seul corps, Un seul Peuple, une seule famille, un seul Temple de l’Esprit Saint qui fait notre unité, plus forte que tout ce qui peut nous séparer.

La fête du Saint Sacrement du Corps et du Sang du Christ, vécue en ce jour, est invitation à nous concentrer sur le cœur de la messe, sur ce pain – cette hostie-, et ce vin, qui devient le Corps du Christ et sur la vin, sang versé pour la multitude. Depuis les origines chrétiennes, beaucoup de théologiens, dont certains moines de Corbie, non loin d’ici, ont beaucoup réfléchi sur ce mystère, en puisant aux origines de la foi d’Israël et en s’aidant de la philosophie : comment du pain peut devenir le Corps du Christ ? Que veut dire cette parole de Jésus sur le Pain : « Ceci est mon corps pour vous » ? Comment se produit ce que Saint Thomas d’Aquin appelle la « transsubstantiation » : sous des apparences identiques, le pain n’est plus vraiment du Pain, il est devenu le Corps sacramentel du Christ, une force pour notre vie ? Les catholiques sont fermement attachés à cette foi : il y a pour eux « Présence Réelle » de Jésus dans l’humble hostie, à laquelle nous communions, hostie digne de respect et d’adoration, que nous portons aux malades comme un trésor. La beauté de nos liturgies, que nous devons préparer avec soin, l’aménagement du chœur, le service des servants d’autel, la concentration du prêtre et la sainteté de sa manière de vivre, tout doit montrer qu’il y a là un mystère immense qui nous dépasse infiniment qui est le mystère de Dieu qui s’offre en sacrifice d’amour pour chacun d’entre nous, y compris le plus vil des pécheurs. Nous parlons parfois, avec des mots qui semblent anciens ou grandiloquents de Corps Sacré, de Précieux Sang, de Très Saint Sacrement, de Pain des anges etc. Ces mots, au fond, disent l’indicible : Dieu qui s’est mis à hauteur d’homme. Il s’est fait notre aliment pour que nous puissions accomplir notre croissance dans la foi, pour que nous puissions devenir ce qu’il est. Il s’est fait homme pour que nous devenions Dieu. Il s’est fait notre nourriture pour que nous devenions, à notre tour, son corps livré par amour. « Regardez l’humilité de Dieu et faites lui l’offrande de vos cœurs ».

Dans un petit livre tout récent, le prix Nobel de littérature de 2023, un norvégien du nom de Jon Fosse, récemment converti au catholicisme, écrit ceci : « La messe donne le repos au corps et à l’âme, la paix. Elle donne le calme. Elle se construit dès le premier instant vers la transformation, la consécration et la communion, lorsque même un vaurien comme moi, là sur le banc tout au fond, tout sur le bord, peut rejoindre la grande communauté des saints, des vivants et des morts, et concrètement participer pour devenir partie intégrante du mystère de la foi ». (Jon Fosse, le mystère de la foi, Artège, 2024, p.82). Il est ébloui par ce mystère de la messe, à laquelle il essaie de participer une ou plusieurs fois par semaine, même si en Norvège, ce n’est pas facile car il y a peu de catholiques et il faut faire beaucoup de km pour rejoindre une communauté chrétienne. Mais, il en va ainsi : des hommes et des femmes, dont tant de jeunes, sont encore éblouis aujourd’hui par le mystère du Corps de Jésus qui se donne, et du Corps de l’Église qui ainsi se construit, mystère étonnant de notre foi.

Au XIIème siècle, souvenez-vous, Saint François d’Assise, dans la petite chapelle en ruines de San Damiano, avait entendu clairement la parole de Jésus lui disant : « Va et rebâtis mon église qui, comme tu le vois, tombe en ruine ? » Saint François avait vite compris que ce n’était pas seulement cette petite chapelle qu’il fallait reconstruire, mais l’Église de son temps. Et il a pris son courage à deux mains, porté par la prière de Sainte Claire. Vous aussi, vous avez compris qu’il fallait rebâtir cette Église qui se délabrait. Mais vous comprenez, plus encore qu’une Église sans âme pour la remplir, ça n’a guère d’intérêt. Alors, j’espère que dans les mois et les années à venir, vous prendrez vous aussi votre courage à deux mains, en engageant de nouveaux bénévoles, dont les ouvriers de la 11° heure (nouveaux baptisés ou confirmés), que vous vous lancerez dans des missions paroissiales, et aurez toutes sortes d’initiatives pour être l’Église en sortie dans ce quartier dans lequel l’Esprit Saint vous précède depuis fort longtemps. Ce lieu sera pour vous un bel atout. Merci à tous ceux qui en prendront soin.

L’hostie Sainte du Christ, nous allons y communier dans un instant. « Temps de repos pour notre corps et de paix pour notre âme ». Que cette communion nous fasse goûter une nouvelle fois le bonheur d’être au Christ et de vivre pour lui.

Amen.

+ Mgr Gérard Le Stang, évêque d’Amiens.